C’est comme ça… vraiment ?
Mais que signifie vraiment cette expression ? On la dit souvent sans y penser : « ben, c’est comme ça. » Ou, comme on dit chez nous en Suisse-Allemande : « Das isch halt so ! »
Mais en réalité, c’est plus qu’une simple phrase. C’est une forme d’acceptation silencieuse d’une situation, sans forcément chercher à en comprendre la cause.
Elle cache souvent une pointe de résignation, comme si on était soit incapable, soit peu disposé à explorer ce qu’il y a derrière. C’est comme ça, je n’y peux rien.
Et après de nombreuses années passées dans l’univers de la parentalité, je peux te dire que j’ai entendu cette phrase des dizaines — non, des centaines — de fois.
La plupart du temps, ça ressemble à ça :
– « Mon enfant ne veut tout simplement pas manger sainement. »
– « Ma fille n’arrive pas à jouer seule. »
– « Mon fils est juste hyper impatient. »
– « Mes enfants ne tiennent pas à table. »
– « Ma fille est un peu brute. »
– « Mon fils ne sait tout simplement pas partager. »
– « Mon ado est toujours sur son téléphone. »
...
Ces phrases te parlent ? Elles te rappellent peut-être des situations chez toi. Dans cette réflexion que je te propose aujourd’hui, je t’invite à être attentif(ve) dans les jours à venir : repère les moments où tu utilises peut-être inconsciemment cette expression « c’est comme ça » — ou bien où tu y cèdes à contre-cœur, faute de mieux.
La parentalité est un apprentissage constant. On traverse des périodes où certains comportements nous échappent complètement, où on ne comprend plus ce qui se passe, et encore moins comment y réagir. Dans ces moments, dire « c’est comme ça », c’est presque rassurant. Mais derrière cette réponse facile se cache un mélange bien plus complexe : émotions, expériences passées, attentes non dites…
Alors je t’invite à réfléchir : quand est-ce que tu considères que ton enfant est "comme ça" et qu’il ne changera pas ?
Quand est-ce que tu laisses tomber, presque par réflexe, et que tu acceptes la situation comme une fatalité ?
Est-ce au moment des repas, quand ton enfant ne veut manger que deux ou trois choses ?
Quand ta fille ne parvient pas à jouer seule ?
Quand ton fils explose à la moindre attente ?
Quand ton enfant passe encore devant les grands-parents sans dire bonjour, pour la centième fois ?
Y a-t-il des situations dans lesquelles tu as perdu espoir ?
Ou d’autres où la complexité t’a fait baisser les bras, au point d’accepter les choses comme si elles étaient immuables ?
Reconnaître ces moments, c’est déjà ouvrir une porte vers une parentalité plus consciente et plus active. Ce simple pas te permet de reprendre une posture proactive, de voir les défis non plus comme des blocages définitifs, mais comme des opportunités de croissance — pour toi et pour ton enfant.
N’oublie pas : les mots que tu choisis ont un poids énorme. Ils vont bien au-delà de la simple communication.
Tes paroles façonnent le regard que ton enfant porte sur lui-même et sur le monde. En prenant conscience des moments où tu dis « c’est comme ça », tu te donnes la possibilité de casser ces schémas qui tournent en boucle — et de les remplacer par une posture beaucoup plus vivante, ouverte et tournée vers des solutions.
C’est un bon moment pour faire pause. Oui, tu as le temps.
Et si tu sens que tu ne l’as pas là maintenant, reviens-y plus tard. Mais ne laisse pas passer cette occasion. C’est justement ce type de déclarations comme « c’est comme ça » qui nous enferment dans un cercle vicieux.
Ce cercle où la honte s’installe, accompagnée d’un peu de frustration, d’une bonne dose de découragement, et surtout de ce sentiment que tout le monde vit les mêmes galères, donc c’est normal, et je ne peux rien changer.
On se met à comparer :
– D’autres enfants refusent aussi les légumes.
– Beaucoup ont du mal à jouer seuls.
– Le fils des voisins est scotché à son téléphone 24h/24…
Et la phrase résonne encore : « C’est comme ça. »
Il est temps de sortir de ce schéma répétitif. Prenons volontairement du recul, appuyons sur pause, et connectons-nous au Saint-Esprit. Demande-Lui de te montrer les domaines où l’espoir s’est peut-être éteint.
Prie pour recevoir un regard renouvelé, un but rafraîchi dans ton parcours de parent. En affrontant ces défis de face, on ouvre la porte à une vraie transformation, à une nouvelle perspective.
Dire « C’est comme ça », c’est fermer la porte au changement. Cela limite toutes les possibilités d’action qui sont pourtant à notre portée en tant que parents. Ironiquement, on s’appuie parfois sur cette phrase justement à cause de cette limitation.
Pendant ton temps de réflexion, essaie d’identifier les moments où tu as perdu l’espoir que quelque chose pouvait changer.
Laisse-moi être claire : non, ce n’est pas censé être comme ça. Et non, ce n’est pas aussi simple. Ce n’est pas parce que « tout le monde fait pareil » que c’est juste. J’entends encore la voix de ma mère résonner dans ma tête. Et tu sais quoi ? C’est encore plus vrai aujourd’hui que quand j’étais ado.
Parfois, on fait trop confiance à nos enfants : on espère qu’ils vont manger équilibré, qu’ils vont apprendre à être patients ou qu’ils vont naturellement parler au-delà de leur écran. Ou peut-être qu’au fond, c’est en nous qu’on ne fait pas confiance. Qu’on doute de notre capacité à leur enseigner.
Mais encore une fois, les mamans, les papas… la parentalité, c’est un marathon. C’est comme ça que ça doit être.
Nos enfants ne vont pas, par magie, adopter de bonnes habitudes. Nous sommes appelés à les former, les entraîner. Même dans un monde où apprendre à son enfant à dire bonjour peut te faire passer pour un extraterrestre — je l’ai vu tant de fois — je sais que c’est possible. Je l’ai vu chez mes parents et chez leurs amis.
Mais aujourd’hui, j’avoue que ça me rend triste de voir à quel point les modèles sont rares.
C’est pour ça que j’ai fait de l’encouragement aux parents ma mission. Oui, c’est possible. Oui, ça prendra du temps. Non, il n’y a pas de raccourci. Mais tu découvriras la beauté du processus d’enseignement si tu refuses les solutions rapides.
C’est une beauté réelle : lente, imparfaite, exigeante, chronophage, et révélatrice de nos propres failles. Ce n’est peut-être pas très “vendeur”, mais je préfère te dire la vérité plutôt que de t’enrober ça dans un beau discours irréaliste.
Ces enfants que tu élèves, ce sont des cadeaux qui t’ont été confiés — pas pour qu’on leur cherche des excuses, mais pour qu’on les forme. Tu as en toi le pouvoir d’impacter ce monde, où la bonté, l’honnêteté et la sagesse ont une vraie valeur et montrent qu’il y a encore de l’espoir.
Alors sois attentif(ve) aux mots que tu prononces à tes enfants. Même si tu ne le vois pas sur le moment, réfléchis à ce que tu leur transmets quand tu dis : « C’est juste comme ça. » En tant que parent, ce genre de phrases se glisse rapidement dans notre langage quotidien — surtout avec les plus jeunes.
Ce qu’on ne réalise pas toujours, c’est que leurs petites oreilles absorbent tout, et que ces mots deviennent une partie de leur identité.
« C’est comme ça que je suis. »
Ils finissent par le porter comme une deuxième peau.
C’est pour ça qu’il faut choisir nos mots avec discernement.
Et maintenant, pense à l’effet que ça a sur les ados. Ce n’est pas une expression neutre. Quand tu fais un commentaire sur un comportement négatif et que tu ajoutes ce « C’est comme ça », l’effet est souvent : roulement d’yeux, soupirs, ou protestations bruyantes.
Fais une pause. Réfléchis à cela. (Pour les parents d’ados, c’est le moment. Pour les autres, votre tour viendra 😉)
Quels comportements as-tu balayés d’un « C’est comme ça » quand ils étaient petits, et qui sont toujours là aujourd’hui — sauf que dans un corps d’ado, ça n’a plus rien de mignon ?
Ce qui pouvait sembler « rigolo » ou « tolérable » chez un enfant de 3 ans ne passe plus du tout chez un ado. Et le respect qu’il ou elle te porte peut s’effriter aussi vite.
Et forcément, notre déception augmente en voyant ces comportements persister.
Et pourtant, ton ado a toujours soif d’être aimé(e) sans condition, de se sentir accepté(e), de savoir que tu crois en lui/elle. Et si ton regard vacille, la relation se fissure. Il ne le dira peut-être jamais à voix haute, mais l’impact est là.
Plus on s’appuie sur ce genre de phrases, plus les habitudes toxiques s’ancrent profondément.
Alors, travaillons ensemble à identifier et éliminer ces habitudes nocives de notre manière d’éduquer. C’est un vrai pas vers une communication plus saine, plus constructive. C’est une porte qui s’ouvre vers le dialogue, la compréhension, et surtout… le changement.
Et oui — c’est OK de retourner voir ton tout-petit ou ton ado et de lui dire :
« Je suis désolé(e) de t’avoir dit si souvent que t’étais comme ça. Tu veux bien me pardonner ? »
Dans nos formations de parentalité, on a vu des parents courageux qui ont osé redresser le cap de leur bateau familial. Tout a commencé par un simple mais puissant « Je suis désolé. Veux-tu me pardonner ? » — suivi d’actes concrets.
Il n’est jamais trop tard. Il y a de l’espoir pour toi et ta famille.
Je sais que lire tout ça peut être un peu lourd. On peut avoir envie de balayer l’idée : « Non mais moi, je n’ai pas ce problème. » Ou alors, c’est comme si une énorme vague de honte nous tombait dessus et qu’on restait figé(e), paralysé(e). Mais aucune de ces deux réactions ne mène au vrai changement.
Prends du temps pour prier. Demande au Saint-Esprit de te montrer les prochaines étapes. Qu’Il te donne une sagesse spécifique pour ta famille. C’est précieux, tellement précieux.
Comme je te l’ai déjà dit mille fois : avance étape par étape.
Le chemin en vaut la peine. Toujours.